L’Avare en 5eme

Quelques accessoires pour rendre l’Avare plus concret, plus palpable: une perruque pour Harpagon, la fameuse cassette, une fraise à accrocher sur une chemise, la toque de cuisinier de Maître Jacques et bien sûr le texte de Molière.

Nous voilà parés pour une séance sur le monologue d’Harpagon “Au voleur! Au voleur! A l’assassin!”. Après avoir regardé la mise en scène de Louis de Funès et bien ri, nous travaillons en chœur sur le monologue. Chacun portera un morceau du texte très connu pour que chacun soit Harpagon, pour le faire vivre de différentes manières, pour chercher des points communs à ce personnage aussi. C’est également un travail d’écoute et de cohésion. Comment être ensemble, se passer la parole? Comment faire vivre ce texte si connu? Lui donner de la force, des intonations différentes, des mimiques et des jeux de scène?

Le travail progresse, les élèves comprennent de mieux en mieux les enjeux de la pièce, connaissent le texte à peu près par coeur et se l’approprient peu à peu. Nous travaillons sur le corps et la voix. Dans quelques semaines, ce sera le spectacle! Il reste encore un peu de travail et de plaisir à mettre en scène!

A bientôt pour de nouvelles aventures!

Une séance de théâtre dans un collège «Espérance Banlieues»

Nous nous retrouvons 8 élèves, une volontaire et moi pour une séance de théâtre dans la cantine. Nous installons l’espace pour créer un nouvel univers propice au théâtre. Chacun arrive au compte-goutte, premier contact, j’essaie de prendre la température et la couleur du jour. Un peu d’humour pour certains, de la lassitude pour d’autres, de la fatigue aussi. Nous avons appris à nous connaître un peu lors des premières séances. Il y a des beaux moments fulgurants, fugaces de partage, de rire, de connivence, mais aussi des moments difficiles, d’incompréhension, d’énervement, de disputes.

Aujourd’hui, nous démarrons l’échauffement avec l’exercice du samouraï : un exercice pour apprendre la cohésion, pour s’amuser, pour donner de la voix et être précis. J’ai du mal à faire entendre les consignes dans le brouhaha mais l’exercice prend, ils se prennent peu à peu au jeu. Certains ajoutent aux consignes leur touche d’originalité. Comment rester dans l’exercice tout en laissant la place à une certaine souplesse ?

Nous poursuivons ensuite par un exercice intitulé « prise de pouvoir » : chacun prend l’espace en marchant, individuellement tout en prêtant attention aux autres. Quand il le souhaite, il s’arrête et dit « moi » en levant le bras d’un geste déterminé. Il récite alors une partie de son texte et quand il le souhaite, il termine en mettant fin avec ce même geste du bras. L’un des enjeux est de s’écouter, d’accepter de laisser parler un autre, lorsqu’on est deux à réagir en même temps. Un bel enjeu que nous devons continuer à travailler… L’autre enjeu est de connaître son texte suffisamment pour le réciter à n’importe quel moment. Sur ce point, je suis plutôt épatée du résultat car ils s’en sortent bien.

Enfin, nous abordons le texte dans lequel nous sommes lancés : un seul en scène de Pierre Palmade intitulé « les Moutons », un sketch au comique tirant vers l’absurde. Nous transformons le seul en scène en un chœur, chacun porte une partie du texte. Nous travaillons les émotions, le crescendo, la diction, la ponctuation. Sur ce texte court, il y a de la matière pour aborder de nombreuses facettes du théâtre. Nous arrivons pour la première fois à traverser la scène de bout en bout et les élèves connaissent relativement bien leur texte. L’un d’eux qui a un bon volume sonore et une voix pour porter le texte m’étonne par son jeu précis et le fait qu’il s’amuse. Un autre n’a pas envie de jouer aujourd’hui et marmonne son texte dans sa barbe. J’essaie de le faire changer d’état, aujourd’hui cela sera difficile. Deux d’entre eux se cherchent et se trouvent, les mots volent, je m’interpose, la volontaire prend le relais à l’écart.

Le principal c’est qu’aujourd’hui, il y a eu du jeu et des émotions ! Il n’y a plus qu’à organiser un peu tout cela et mettre en scène avec plus de précision.

A bientôt pour de nouvelles aventures !

Une séance de théâtre dans le cadre de l’école à la maison

Pour la deuxième fois, je rencontre 7 élèves du CP au CM1. Ils pratiquent l’école à la maison le matin et diverses activités comme le yoga, la danse ou les arts plastiques l’après-midi. Quelle chance de pratiquer autant d’arts différents et de pouvoir développer son cerveau émotionnel et intuitif autant que le rationnel ! Dans l’entrée, cela bavarde gaiement. Ils se connaissent et se retrouvent régulièrement.

Nous travaillons pour les premières séances sur les sensations, l’imaginaire et les émotions afin de faire connaissance et aussi d’apprivoiser le théâtre. Après avoir retiré manteaux et chaussures, nous commençons par nous échauffer en marchant dans l’espace. Cela devient un rituel, s’approprier l’espace, tenir compte des autres, créer un sas aussi avec le quotidien pour rentrer dans le cours de théâtre.

3 sont plus âgés, 4 plus jeunes : cela permet d’apprendre à chacune de s’attendre, de s’entraider, de voir des manières de faire différente. Et finalement, dans le langage corporel, on est tous égaux et toujours un peu débutants.

Ensuite, nous abordons les marches avec des émotions et nous cherchons dans le corps ce que cela produit, crée…Comment ressentir la joie dans tout le corps ? Dans le visage oui mais aussi dans le ventre, dans les pieds, dans le dos, …Quelle attitude peut-on avoir ? Sans forcer ? Puis, nous travaillons la gamme du rire, un classique mais si intéressant pour travailler les émotions. 4 chaises, 4 personnes : l’œil frise, une petite joie apparaît, je m’appuie sur le public, je la passe à mon voisin, qui agrandit cette joie et ainsi de suite jusqu’au fou rire…Outre la bonne humeur qui est créé, cela leur apprend la nuance, le regard de l’autre, la progression dans l’émotion et la concentration.

Nous continuons avec des statues de personnages pour travailler l’attitude juste, la représentation des stéréotypes et la précision. Nous constatons que plusieurs personnages peuvent donner lieu à des statues différentes, on s’inspire les uns les autres. Il y a une véritable émulation et l’imagination se déploie.

Enfin, nous terminons par une relaxation sur les tapis. Les enfants font appel à leur imaginaire au rythme d’une histoire que je leur raconte. Pour certains, il est facile de se laisser aller, pour d’autres, il y a une petite résistance :  un œil s’ouvre de temps à autre pour voir ce qui se passe…Peu à peu, ils apprendront à lâcher prise et à entrer dans un univers différent.

Pour terminer la séance, je leur demande comment ils ont vécu cette relaxation, leur ressenti ainsi qu’un mot pour définir le cours, ce qu’ils ont appris ou retenu ou encore une émotion du moment.

Une belle séance pour tous !

A bientôt pour de nouvelles aventures !

Du théâtre par vidéo

Le nouveau confinement et la fermeture d’école ont sonné comme un coup de massue pour mes cours. Passé le premier moment de sidération, je décide en concertation avec mes équipes de faire travailler les élèves par vidéo. Notre spectacle est déjà prévu : le texte est choisi, la distribution est faite, nous avons dessiné les personnages, parcouru les textes, expérimenté des mises en jeu. Ce sera l’occasion de faire un travail pointu sur l’entrée des personnages, bien les caractériser (démarches, attitudes, mimiques), les faire vivre et jouer les premières répliques. Cela permet de travailler l’articulation, la ponctuation, l’intonation. Finalement, cela crée la possibilité de faire travailler chacun de manière plus précise et de pouvoir faire des retours individuels.

Le retour des élèves est globalement enthousiasmant : ils s’investissent, trouvent du plaisir et s’engagent dans leur jeu à travers la vidéo. Certains ont un costume, d’autres un accessoire qui les soutiennent dans leur jeu. Le plaisir est manifeste et même si le texte n’est pas toujours su, que l’articulation n’est pas toujours bien maîtrisée, ils ont presque tous fait un effort pour chercher leur personnage. L’un marque les trois coups, un autre travaille ses mimes avec beaucoup de sérieux et d’humour à la fois, alors qu’un autre emploie un ton ironique très juste pour son texte. Nous sommes donc en bonne voie ! Je leur propose donc un retour individuel et de reprendre mes propositions afin de se filmer une nouvelle fois. Je les interroge sur l’intention de leurs actes, le choix du regard et de l’adresse. Je mets l’accent sur l’importance des silences et des pauses entre plusieurs phrases ou intentions différentes.

J’attends avec impatience de découvrir leur progrès et de voir leur nouvelle prestation.

A bientôt pour de nouvelles aventures !

Une séance de masque neutre

Aujourd’hui, nous nous retrouvons en réel, après plusieurs semaines à distance. Comme je ne sais pas pour combien de temps ce sera possible, je décide de profiter au maximum de cette opportunité. On ne saisit que mieux la valeur d’être ensemble et de partager.

J’avais prévu de travailler sur des textes mais je change mon fusil d’épaule et décide d’expérimenter avec eux le masque neutre. On troque donc nos masques sanitaires pour des masques neutres, ce qui n’est pas désagréable. Les jeunes commencent d’ailleurs par comparer ce que cela fait comme différence avec le masque sanitaire…Ce sont des masques blancs qui permettent de travailler sur la disponibilité, l’écoute, l’ouverture. Ils agrandissent les gestes, donnent de l’amplitude au corps et permettent de faire attention à la portée de chaque geste. Il n’y a plus de psychologie, ni de personnage. L’objet de la séance est donc un travail du corps important.

Les jeunes commencent par observer les masques, les mettre et déambuler dans l’espace pour voir ce que cela produit sur soi et sur les autres. Regarder et être regardé en somme, ce qui est déjà beaucoup. Ils sont à la fois amusés et un peu effrayés par ce masque.

On travaille ensuite sur les états et émotions avec les masques. Comment un petit geste, un mouvement peut créer l’état ou l’émotion ? Comment chaque corps parle différemment ? Comment chacun est unique pour exprimer un langage ? Un groupe fait, l’autre observe. Nous échangeons. Ce masque les perturbe, les bouscule mais il transforme et cela fait du bien. On essaie, on tâtonne, on est dans l’expérience.

Nous réalisons ensuite plusieurs improvisations par deux et ce qui est extraordinaire, c’est qu’avec les mêmes consignes, chacun a une façon différente de comprendre, de donner, de vivre l’expérience. Ils s’en rendent compte dans leur retour et apprécient aussi la place de spectateur, de recevoir ce que leurs camarades leur donnent.

J’insiste sur la question du jugement dans la reprise. Il n’y a pas tellement de « c’est bien » ou « ce n’est pas ça ou pas bien » mais plutôt des observations sur les corps différents, la notion du temps (qui n’est pas la même du côté des spectateurs et du côté des comédiens), du plaisir éprouvé en tant que comédien et ressenti par les spectateurs, de la précision des gestes.  

Une très belle séance où chacun a joué le jeu d’essayer ! Nous continuerons à approfondir le masque neutre.

A bientôt pour de nouvelles aventures !

Une séance d’improvisation

Après quelques cours à distance dans ce groupe (ils sont 8, 7 filles et un garçon qui sont volontaires pour faire du théâtre le soir après l’école), nous reprenons ensemble en réel ! Nous sommes tous très heureux de nous revoir en vrai !

Après quelques échauffements, déplacements dans l’espace et exercices de cohésion, nous voilà au cœur de la séance. Aujourd’hui, nous travaillons des improvisations pour se remettre en jambes.

Une série d’improvisations sans paroles, puis une série avec. Je redonne les grandes règles d’une improvisation : accepter la proposition de l’autre, avoir du rythme, trouver une fin, équilibrer la parole, … Je redécouvre avec plaisir comment chacun comprend les consignes et fait avec sa personnalité.

La deuxième série est une improvisation autour de l’horoscope : une personne est la voyante qui fait des prédictions, l’autre est dans la position d’écoute et réagit aux prédictions. Certains trouvent plus difficile de verbaliser, d’autres non. Une improvisation est très calme, il se passe peu de choses, une autre est pleine d’énergie et part un peu dans tous les sens. Je leur fais observer les différences, constater ce qui marche, quand notre écoute est pleine, quand il faut poursuivre et tirer le fil. Ils ont tous envie de jouer, d’essayer, cela fait plaisir à voir.

Ils ont besoin de s’exprimer, de partager, de vivre des émotions et d’autant plus en ce moment où les libertés sont restreintes. C’est tout cela que le théâtre permet !

Nous continuerons sur d’autres thèmes les prochaines fois avant d’attaquer le texte…

A bientôt pour de nouvelles aventures !

Une journée de spectacle

Dans ce groupe, j’ai 12 élèves de 5eme, 10 garçons et 2 filles : une classe entière. C’est un projet d’école. Ils sont plein d’énergie : une énergie tantôt positive, pleine d’enthousiasmes, d’envies et de propositions, tantôt négative qui mène à la dispersion et aux conflits. Il faut donc jongler et canaliser cette énergie.  

Nous avons travaillé 4 mois ensemble (en présentiel, quelle chance, en ce moment !) pour découvrir lors d’échauffements, d’improvisations, de la découverte du clown et du masque neutre, quelques facettes du théâtre. Nous avons aussi travaillé deux scènes de gares comiques pour les mettre en scène avant les vacances de noël.

Initialement, nous devions les jouer devant toute l’école et les parents, dans une grande salle qui sert aussi de cantine, mais finalement covid oblige, ce sera entre nous. La salle de la cantine n’est plus disponible, nous changeons notre fusil d’épaule et jouerons dans une petite salle plus intimiste devant le groupe CM2-6eme-5eme.

Le Jour J, je vais installer un grand tissu et une guirlande de lumière sur le mur du fond pour créer une scène. Nous inventons avec les moyens du bord. Cela rend plutôt bien mais il faut espérer que cela tienne…

J’apprends qu’un jeune est malade ! Zut ! Trouver une solution, s’adapter aux imprévus ? Gentiment deux élèves se proposent pour le remplacer au pied levé mais ne connaissent pas son texte. On débat, puis on choisit. L’élève gardera son texte en main pour la scène, ce n’est pas parfait mais je suis soulagée que l’un d’eux accepte.

Les jeunes se mettent en costumes (choisis et élaborés ensemble) et prennent leurs accessoires. Nous allons dans la salle pour se remettre en tête les entrées et sorties, déplacements. Nous installons les coulisses et j’essaye d’insister sur l’importance du silence dans les coulisses afin de laisser les acteurs jouer en toute sérénité. Je les rassure sur leurs capacités et tente d’apaiser leurs angoisses de dernière minute. C’est bien normal d’avoir le trac. On sent une certaine excitation et une ébullition ! Je ne peux plus rien maintenant, je m’efface devant mes petits comédiens. Il n’y a plus qu’à… J’aurai aimé disposer d’un peu plus de temps pour faire quelques exercices de dynamisation et de confiance avant le spectacle, mais il faut faire avec le temps imparti.

Les CM2 puis les 6eme font une présentation et c’est notre tour ! Une élève présente la scène, ils jouent la première scène, les rires fusent. Ils s’adaptent bien, je suis le texte et ce n’est pas toujours exactement le texte, je me demande comment faire pour les aider s’il y a un trou de mémoire. Mais ils s’en sortent bien, se rattrapent aux branches et les autres s’adaptent. Je suis fière d’eux. Ils ne se laissent pas impressionner. Ils jouent avec des masques chirurgicaux, alors il est vrai que le niveau sonore et l’articulation n’est pas toujours parfaite, mais dans ces conditions c’est presque un exploit ! Il y a des révélations : les plus timides vont jusqu’au bout, les plus extravertis donnent le meilleur d’eux-mêmes. Je sens qu’ils sont heureux d’être sur scène, d’arriver à un résultat satisfaisant tous ensemble. Quelle joie !

La deuxième scène se déroule aussi sans encombre. Les placements et déplacement sont encore à travailler car il arrive qu’ils cachent un peu certains mais dans l’ensemble, ils ne se sont pas décontenancés à cause des rires et ont bien eu conscience de la différence entre moqueries et rires de plaisir, d’amusement. Surtout, ils se sont serré les coudes, le groupe est bien là, la victoire est celle du groupe. Salut final, ils sont heureux.

Je les félicite un par un pour leur travail, leur concentration et leur esprit de groupe. Et le plus beau cadeau pour moi est de voir leur mine réjouie et leur demande : « Madame, après on fait quoi comme spectacle ? » Le premier est à peine fini qu’ils en redemandent !

Nous sommes prêts pour attaquer la deuxième partie de l’année et monter une pièce un peu plus ambitieuse !

A bientôt pour de nouvelles aventures !